Rencontres filiations
Après une enfance et une adolescence en familiarité avec l’art, la peinture, je ne m’y suis pas engagée à l’âge adulte, persuadée que rien de personnel ne pourrait surgir de ma main tenant un crayon ou un pinceau.
Dans les années 70, j’ai été bouleversée en découvrant l’art à partir d’objets pauvres comme les quilts des femmes américaines (1) dont la création prolonge la vie des morceaux de vêtements. Puis ce fut la révélation des oeuvres de Philippe Dereux à partir d’épluchures (2) , celles de l’art brut, et plus tard, du théâtre-objet (3)
Au début de mon travail de collage dans les années 80, j’avais peu de références d’artistes dans ce domaine (4). C’est seulement après avoir poursuivi un cheminement personnel pendant plusieurs années que j’ai réalisé que j’appartenais par la démarche, à une sorte de lignée qui a commencé en Europe dans les années 20 avec Schwitters , s’est prolongée plus tard avec Villeglé, Philibert-Charrin, Anna Shannon…
J’ai eu conscience d’appartenir à une communauté d’ artistes du collage, non pas tant dans le fait même de coller, mais dans le rapport au passé. Dans le désir de travailler à partir de l’objet délaissé, dans l’émerveillement des traces du temps, de la sensualité qui se dégage de l’usure du papier, dans l’émotion des traces de vies, jusque dans les déchirures provoquées par d’autres, anonymes….
Un désir d’échapper au cycle de la production et de la consommation, un besoin d’entrer en dépendance par rapport à quelque chose de « donné » à contempler.
(1) The QUILTS of GEE’S BEND
(2) Philippe DEREUX Petit Traité des Epluchures ed. CHAVE VENCE
(3) Jean-Luc MATTEOLI L’objet pauvre, mémoire et quotidien sur les scènes contemporaines françaises ed . Presses Universitaires de Rennes
(4) 1ère grande exposition des œuvres de Schwitters en France : 1995 au Centre
Pompidou.
Encounters and filiations
In my childhood and teenage years, I developed a familiarity with the fine arts and paintings. As an adult, at first, I did not think to commit myself to artistic creation, since I believed I could not achieve anything personal holding a pencil or a brush.
In the seventies, I experienced a tremendous shock when I discovered a form of art based on "poor objects" like the quilts manufactured by american women, a form of creation which gives a new life to pieces of clothing. Then I became acquainted with the work of Philippe Dereux, who recycles peels, and later I discovered Art Brut and the Object theatre.
When I first started my collages work in the 80ies, I did not have a very large frame of reference in that field. I had already been following my own creative path for a few years when I realized that the course I was taking, was part of a long tradition which started in Europe in the 20 ies with Schwitters, a tradition continued by Villeglé, Philibert-Charrin, Anna Shannon… I became conscious that I was a member of a community of collage artists, not so much through the creative process involving the collage technique, but in our relation to the past : Our common desire to work on abandoned objects, our marveling at the way time had left its marks on them, at the sensuality generated by worn off paper, our emotion when confronted with the traces of past lives and the fact that these pieces of paper had already been rent by other hands, anonymous. A desire to escape the cycle of production and consumption, the need to become dependent of something merely offered to the eye for contemplation.